par Thomas Gervais
Tous ceux qui font bouger des objets par la seule force de leur pensée sont des magiciens ou des menteurs; tous, sauf Matt Nagle. Le jeune quadraplégique de 27 ans est capable de déplacer un curseur à l’écran de son ordinateur, d’ouvrir ses courriels, et même de jouer à des jeux vidéo sans bouger le petit doigt ni même émettre un son.
Son secret? Une série de minuscules aiguilles – des électrodes – implantées dans son cerveau, qui lisent directement ses pensées et les transforment en mouvements à l’écran de l’ordinateur. Matt est le premier à s’être prêté à cette expérience réalisée par la compagnie Cyberkinetics, aux États-Unis.
Pour l’instant, cet appareil – le BrainGate – déchiffre les pensées aussi approximativement qu’un enfant de quatre ans lirait un roman de Sartre. «Le langage des neurones est extrêmement complexe. De plus, il existe un énorme “bruit de fond” associé à l’activité du cortex cérébral», dit Steve Scott, professeur au département d’anatomie et de biologie cellulaire à l’université Queens, en Ontario. Un peu comme lors d’une conversation sur une mauvaise ligne téléphonique, dans une langue étrangère de surcroît. Le patient est donc limité à des commandes mentales simples pour être bien compris par son implant. Haut, bas, gauche, droite, clique ici, etc.
Néanmoins, ces modestes résultats pourraient grandement faciliter la vie de milliers de quadraplégiques. «Ils pourraient allumer les lampes de leur maison, utiliser leur ordinateur et même contrôler des mains robotisées pour saisir des objets autour d’eux», explique Steve Scott qui a signé un article sur le sujet dans la revue Nature, l’an dernier.
Cette technologie possède malheureusement encore beaucoup de défauts qui ne seront pas résolus avant de nombreuses années. Le plus «encombrant»: elle n’est pas encore sans fil! Le cerveau du patient doit être relié à l’ordinateur par un câble. C’est pour le moins gênant. (Ne vous y prenez surtout pas les pieds!) En plus, les électrodes s’oxydent relativement rapidement. Et chaque remplacement nécessite une chirurgie «à cerveau ouvert».